Tour du Mont-Blanc : on l’a fait ou pas ? (2/2)

La photo d’illustration qui spoile direct l’arrivée de la neige…!

Dans l’épisode précédent, deux aventuriers téméraires, lancés à l’assaut du Tour du Mont-Blanc, avaient fait plus de la moitié du chemin. Attaqués dès leur deuxième nuit par un rôdeur nocturne qui restera à jamais non identifié, ils avaient résisté à ça, mais aussi à la pluie, au vent, à l’altitude, aux glissades, aux italiens parfois ronchons, et au coronavirus. Leur bière quotidienne leur permettait de ne pas connaître la soif, tandis que leur réserve de graines et barres de céréales devait être suffisante pour les quatre derniers jours. Rien ne semblait pouvoir leur arriver. Ils étaient les rois du monde. Ils font tout c’qu’ils veulent. Ils ont du monde autour d’eux, mais ils sont seuls.

Citer les comédies musicales des années 2000… Mouais.

Les étapes 6 et 7 étaient parmi les plus courtes de l’itinéraire, vous vous en souvenez sans doute. La sixième emmenait nos héros de La Fouly à Champex-d’en-Haut, bled situé entre Champex-Lac et Champex-d’en-bas. C’est pas moche, loin de là, mais par élimination, c’est sans doute la journée la moins intéressante en termes de paysages. Même si le matin, on suit longtemps la Dranse de Ferret ; et l’après-midi, on profite brièvement de la vue sur le lac en question.

Le soir venu, nous plantons la tente sur le terrain du gîte Bon Abri, ce qui nous permet de profiter de leurs douches mais aussi de prendre le diner chez eux… Et on a de la chance : fondue au programme ce soir-là !

La septième repartait bien évidemment de Champex en direction du col de la Forclaz, étape incontournable pour ceux qui comme nous ont acheté la moitié de leur équipement chez Decathlon. C’est l’étape la plus courte en distance de notre TMB : même pas 15km. Mais elle comporte une grosse montée vers Bovine, où nous attend un très beau panorama.

On redescend vers le col de la Forclaz qui n’est qu’à 1.147m d’altitude. On y trouve un unique hôtel qui gère aussi le camping attenant, où nous serons les seuls à planter la tente : les températures sont bien descendues au fil de la semaine. A la réception, l’employée nous demande :
– Vous aviez réservé un emplacement pour une tente, c’est ça ?
– Oui.
– Et finalement, vous voulez une chambre ?
– Euh non…

La nuit fut effectivement froide et humide et… comme on était les seuls campeurs et qu’il y avait un petit bâtiment abrité et chauffé avec quelques tables, un évier et un micro-ondes réservé aux campeurs, et que nous étions les seuls campeurs, on a finalement décidé de prendre nos sacs de couchage et d’aller se poser à l’intérieur ! Les puristes diront que « c’est de la triche », en attendant on a eu plus chaud que sous la tente – et payé bien moins cher qu’une vraie chambre d’hôtel.

C’est donc en plutôt bonne forme qu’on reprend donc la route pour la huitième étape : la plus dure sur le papier… D’autant que la neige est arrivée avec un peu d’avance et a commencé à tomber pendant la nuit !

On commence d’entrée par se taper plus de 1.000m de dénivelé en montant vers le col de Balme (2.200m d’altitude) qui marque la frontière franco-suisse et donc notre retour au pays. La neige arrive à l’approche du sommet, et l’on est contents de pouvoir se réfugier au refuge du col de Balme, où j’ai adoré l’humour du gardien. Il nous a entre autre fait croire qu’il était fermé, mais qu’on pouvait rentrer quand même, avant d’avouer qu’en vrai il est ouvert mais qu’il se méfie des gens qui s’installent et vont rester trois jours. Nous n’avons squatté qu’une vingtaine de minutes mais j’ai adoré le personnage, et si je refais un jour le TMB, je prévoirais de faire étape chez lui à coup sûr !

Lui-même a été surpris par l’arrivée de la neige plus tôt que prévu, a décommandé son groupe du soir-même et ne nous conseille pas forcément de monter jusqu’au refuge du Lac Blanc, perché à 2.300m, notre point de chute théorique pour cette dernière nuit. On appelle la gardienne qui nous dit que ça peut passer, mais moyen, et qu’il vaut mieux emprunter un itinéraire bis qui nous rallonge à peine et nous évite le passage par les petites échelles incrustées par la roche, potentiellement trop glissantes avec ce temps.

Après être redescendus, on va donc donc entreprendre cette ultime ascension. La neige continue de tomber : arrivés à 2.000m d’altitude, on en a déjà jusqu’aux genoux. Il n’y a aucune autre trace de passage, le chemin est invisible, mon appli de localisation (maps.me) ne nous aide pas beaucoup, on est encore à 3 km du sommet… et la nuit arrive. La sagesse l’emporte après avoir galéré 30mn en progressant d’un seul hectomètre : on décide de faire demi-tour et de regagner la route.

Je n’ai aucune photo de ce passage-là (dommage car il y avait des endroits magnifiques, et on a même croisé un chamois pas farouche qui nous regardait en se disant qu’on était quand même sacrément cons… Mais vu les conditions, aucun de nous deux n’a eu le réflexe de sortir son Iphone pour immortaliser ça !

On doit particulièrement faire pitié, trempés et sales après plusieurs gamelles, car la première voiture qui passe nous prend en stop (bien qu’elle n’ait qu’une place dispo) ! Elle nous amènera à la ville la plus proche, Chamonix, où on s’engouffrera dans le premier hôtel qui passe. L’occasion de visiter un peu cette ville le lendemain…

La 9ème étape aurait donc du nous amener du Lac Blanc aux Houches, une étape essentiellement descendante mais avec quand même le passage par le Brevent… qui aura donc été zappé. A la place, c’est ce que j’appellerai une « petite balade » qui relie les Houches depuis Chamonix, sans dénivelé ou presque.

Si on avait fait l’étape prévue, on en aurait probablement chié pour redescendre, la neige ayant continué de tomber sur les sommets la veille.

Est-ce qu’on peut considérer qu’on a bouclé notre Tour du Mont-Blanc ? Pas sûr, il restera toujours cette petite déception d’avoir du faire demi-tour avant un sommet et donc d’avoir raboté la neuvième étape aussi. Vu les conditions et mon matos, qui était très bon mais pas préparé à affronter une telle quantité de neige, difficile de faire autrement. C’est le risque d’y aller fin septembre et pas en juin/juillet !

Arrivé aux Houches, notre petit hôtel – déjà réservé en amont lui – était une tuerie. Une piscine couverte, un sauna, une super chambre (surclassement inclus) pour 70 balles à peine. Voilà bien un avantage de cette période creuse pour le tourisme !

Et une très blle vue depuis notre petit balcon en prime !

Et ainsi s’achevait mon premier gros trek.

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Les bonnes adresses du TMB :

  • Les Chambres du Soleil (aux Chapieux) : nous n’y avons pas dormi, mais simplement diné, et c’est un de mes meilleurs diners du séjour. Tout est fait maison, et le gérant a plein de bières artisanales locales pour accompagner ça.
  • Refuge Maison-Vieille (entre le col de la Seigne et Courmayeur) : le seul refuge où nous avons dormi en dortoir. L’endroit est sympa, mais je retiens surtout leur petit-déjeuner, le meilleur du séjour. Dommage qu’ils n’aient que de la bière italienne, le seul point faible !
  • La Peule (Val Ferret côté suisse) : « ce n’était rien, que deux cafés, mais ils m’avaient chauffé le cœur… ». Un accueil hyper chaleureux après une étape difficile bien qu’il soit normalement fermé en font sans doute ma meilleure rencontre du TMB. Il a même réussi à garder sa bonne humeur quand il a su qu’il avait affaire à un inspecteur des impôts et une banquière, c’est dire !
  • Gîte Bon Abri (Champex) : je ne suis sans doute pas objectif si je dis que c’est notre meilleur dîner du tour : ils avaient de la fondue au menu ce soir-là… Mais elle était excellente, c’est un fait !
  • Refuge du col de Balme (col de Balme, d’où son nom) : voir plus haut. Là aussi c’est juste un arrêt-boisson, mais il y a des gens qui nous marquent même en les croisant une demi-heure et il en fait partie !
  • Chalet-Hôtel du Bois (les Houches) : notre fameux petit hôtel de l’arrivée, avant le retour dans nos contrées dont je parle un peu plus haut, avec un super accueil et un super équipement pour pas cher du tout – même si le tarif n’est sans doute pas le même pendant les vacances estivales, la saison de ski… ou même dans une période normale sans covid.
  • La Calèche (Chamonix) : et enfin, le repas du dernier soir pour célébrer notre arrivée avec plein de spécialités du coin (tarte au reblochon, raclette au reblochon…) avec un excellent Chasse-Spleen 2010 que je conseille autant que le resto lui-même.

Après, la plupart des adresses évoquées (ou pas) dans ce TMB était au moins correctes ou bonnes : le camping du Pontet à Contamines, le refuge des Mottets, le refuge Elisabetta, le camping des glaciers et l’auberge des glaciers à La Fouly (les deux n’ont rien à voir entre eux), l’hôtel de la Forclaz, la micro-brasserie de Chamonix (MBCHX)… En fait, on aura eu un seul accueil exécrable, dans un endroit que je ne recommande donc pas, c’est le refuge Bonnatti.

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Le point budget :

Si vous m’avez bien suivi, on a donc fait du camping tous les soirs sauf deux, mais presque toujours à côté d’un gîte qui faisait le diner ou d’un endroit où il y avait des restos. Une philosophie qu’on retrouve dans la plupart de mes voyages en fait : j’économise sur l’hébergement car je me fous du confort pour dormir, et me lâche sur la bouffe. Un choix gagnant car les refuges sont souvent chers pour un confort sommaire (des grands dortoirs potentiellement bruyants avec peu d’intimité, de l’eau chaude capricieuse) alors qu’à l’inverse on mange super bien, avec des quantités généreuses qui permettent de sauter le repas du midi sans problème !

Niveau poids du sac, c’est aussi un bon compromis : oui, il faut traîner la tente, les matelas et les sacs de couchage, mais on ne s’est pas encombrés d’un réchaud, de vaisselle ou de bouffe autre que nos « rations de survie » (céréales, noix…).

Niveau budget, ça donne un total raisonnable aussi d’environ 600€ :
170€ pour les hébergements, dont deux hôtels, un refuge en dortoir, quatre « droits de planter la tente » et cinq petits-déjeuners ;
360€ pour boire et manger sachant qu’il y avait au minimum une pinte quotidienne pour fêter l’arrivée de l’étape, et surtout que le dernier resto à Chamonix pèse 100 balles par personne à lui seul…
90€ pour l’aller-retour en voiture (péage, essence).
Je ne compte ni les petits achats de souvenirs ou autres, ni ceux de matos (vêtements techniques, crèmes et produits, etc) qui resserviront j’espère !

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Le bilan :

C’était donc mon premier trek. Pas facile physiquement, surtout après un été sans trails ! Ca a tenu même s’il reste la déception de pas avoir fait la dernière étape entièrement, en « squizzant » le Brévent, et ce goût d’inachevé au final… Mais je reste quand même assez content de moi et de la distance parcourue, surtout encore une fois avec ces conditions météo qui rendent le Tour bien plus difficile qu’en été. Mais s’il était rarement dans le ciel, moi j’avais malgré tout le soleil jour et nuit dans les yeux d’Émilie.

Citation de Joe Dassin mise à part, heureusement que j’étais avec une… peut-être pas spécialiste, mais en tout cas quelqu’un qui avait déjà un peu d’expérience, puisque elle avait fait le GR20 et le Mercantour ces dernières années. Mine de rien, j’ai vraiment senti la différence entre les deux premiers jours où mon dos souffrait, et la suite une fois qu’elle a revu avec moi le réglage des bretelles, la répartition du poids dans mon sac, ou l’application de quelques produits miracles qu’elle avait fait suivre.

Niveau physique, pas de changement notable avant/après (la graisse perdue en journée dans les ascensions était vite reprise avec la bière et les spécialités au fromage du soir !) mais pour retourner courir depuis sur un parcours avec dénivelé que je faisais déjà lors du premier confinement, je m’aperçois que j’ai bien amélioré ma moyenne. Est-ce lié ? Possible !

Et niveau mental, dans une période où les petits tracas (professionnels, relationnels…) s’accumulaient, je dois avouer que cette expérience est formidable pour se vider la tête. Sans doute bien plus efficace qu’un voyage classique d’ailleurs.

Ne reste plus qu’à reprendre mes bâtons et repartir, peut-être l’été prochain ? A voir où… Pyrénées, Corse, pourquoi pas sur le GR auvergnat aussi : tout est ouvert !

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